Depuis le 19 septembre, la Côte d'Ivoire est en
proie
à une insurrection armée préoccupante
qui a fait de nombreuses victimes tant civiles que militaires.
Des faits avérés d'exactions, de meurtres,
d'assassinats et d'exécutions extra judiciaires,
ont été
mis à nu par diverses associations ayant eu à
enquêter notamment dans la zone d'Abidjan.
D'autres cas d'atteintes aux droits de la personne humaine,
ont été perpétrées dans la
région de Daloa entre le 18 octobre et le 22 octobre.
Des témoins interrogés par la presse occidentale
parlent d'un nombre important de victimes. Concernant
ces faits, le gouvernement ivoirien et les rebelles du
MPCI s'accusent mutuellement d'en
être les responsables. Depuis, de nombreuses de
plaintes ont été portées à l'attention
de la communauté internationale par les pays limitrophes
de la Côte d'Ivoire tels que le Burkina Faso, le
Niger, le Mali, la Guinée.
Par ailleurs, dans ce contexte de confusion et de peur
(entretenu par des bandes armées) au coeur de
la capitale sous contrôle des forces loyalistes,
on note une série incroyable d'enlèvements
et d'assassinats de responsables politiques ou de membres
de leurs familles. Que font concrètement les forces
de police et la Justice dans ces dossiers ? Existe t-il
une volonté
affirmée de retrouver les coupables ?
Malgré les récentes initiatives de l'Etat
ivoirien visant à rechercher les éventuels
responsables de ces crimes contre l'humanité,
il nous apparaît nécessaire d'émettre
de sérieuses réserves. En effet, quelle
peut être la volonté réelle de ce
gouvernement de punir les véritables coupables
? Ces derniers, selon des témoignages concordants
seraient encore une fois (une fois de trop ?!) des militaires.
Quand on sait depuis le procès du " charnier
de Yopougon ", que ce régime, conforté par
la RealPolitik, a toujours refusé de sanctionner
les hommes des corps habillés, il est évident
et nécessaire que tous, militants des droits humains,
nous demeurions sur le qui-vive.
Inutile alors d'évoquer les tacites connivences
et coupables collusions qu'entretient ce régime
avec les médias de la haine et de l'ethnisme pro-gouvernementaux,
voire avec les " escadrons de la mort " Tous
ces meurtres, ces exactions et autres violations des
droits humains ne sont-ils pas la conséquence
manifeste d'appels aux meurtres et à la délation,
initiés par une presse nationaliste aux accents
xénophobes, dont la responsabilité dans
les actes suscités est une lapalissade ? Pourtant
que fait concrètement la communauté internationale
pour les victimes ?
Les victimes et ayants droits des victimes ne méritent
pas ce traitement qu'on leur inflige au nom de la RealPolitik
! Cette façon d'agir heurte notre humanité,
notre moralité et notre intellect. Comment dans
ces conditions envisager une réconciliation entre
les peuples de la sous région, si les victimes
ne peuvent faire leur deuil parce que de prétendus
politiciens et pseudo démocrates en ont ainsi
décidé?
Un sociologue disait un jour : "il ne peut y avoir
de réconciliation véritable sans justice
! Ce n'est pas seulement une question de morale, c'est également
par souci d'efficacité. Parce que tous ces gens
qui commettent ces crimes ou qui incitent
à les commettre, le font parce qu'ils sont certains
de ne pas être poursuivis. Et c'est cela qui doit
changer
".
La culture de l'impunité sur tous les continents
contient les germes d'une révolte latente. Et
l'image que donne la Côte d'Ivoire aujourd'hui,
est le reflet d'années d'injustice supportée
par des populations qui ne demandent rien d'autre que
de vivre paisiblement et en bonne intelligence. En Côte
d'Ivoire comme au Rwanda, l'impunité alimente
la spirale des violences...
Il est clair que la responsabilité des mutins
dans la crise actuelle est immense. En cherchant à renverser
le pouvoir par les armes, ils ont battu en brèche
le fragile processus démocratique et les ténus
efforts de réconciliation mis en place conformément
aux recommandations du Forum pour la réconciliation
nationale d'automne 2001. Ils ont pris le risque du déclenchement
d'une guerre civile et d'une crise régionale majeure.
Cette responsabilité évidente, ne peut
cependant légitimer les dérives xénophobes
et les exactions actuelles perpétrées par
l'armée régulière et de prétendus
patriotes, pour lesquels passion rime avec déraison.
Alors pourquoi le gouvernement ivoirien qui crie à hue
et à dia qu'il respecte les droits de l'homme
propose-t-il aux rebelles de les amnistier, sinon pour éviter
de réaliser une véritable autocritique
et ainsi promulguer une loi d'auto-amnistie pour couvrir
ses propres crimes dès que possible?
Le principal problème des diplomates et autres
responsables politiques, c'est qu'au nom de la RealPolitik,
ils ne s'intéressent qu'aux évolutions
institutionnelles; négligeant en cela la dimension
sociologique du problème ivoirien : les préjugés
nés de l'ivoirité, les ressentiments, et
le vécu des personnes au coeur de la société civile;
par conséquent il s négligent les droits
de l'Homme.
Devant les tracas, manigances, trompe-l'oeil et autres
basses oeuvres de ce pouvoir pour se justifier au regard
d'une prétendue mais non prouvée agression
extérieure du Burkina Faso, d'une supposée
implication de la France à
travers ses réseaux funestes de la brumeuse Françafrique,
et ainsi favoriser appels aux meurtres et autres discours
haineux et xénophobes par le biais des médias
et de la presse nationale, il est IMPORTANT et URGENT
d'agir et de proposer des voies de résolution,
malgré le contexte confus et le sentiment d'impuissance
qui en découle. Voici celles
émanant du bureau du Collectif des Ivoiriens de
France pour la Démocratie :
1. Le refus [condamnation] de la banalisation de l'ethnisme
et en particulier du concept fallacieux d'"ivoirité".
Ceci inclut les appels et incitations aux meurtres et à
la délation y compris les discours xénophobes.
Enfin le soutien aux forces sociales et aux médias
qui refusent et combattent le repli identitaire.
Aussi, convient-il de soutenir l'action de Reporters
Sans Frontières, au Conseil de sécurité des
Nations Unies, visant
à saisir la CPI (Cour Pénale Internationale)
sur la situation de la presse en Côte d'Ivoire.
2. La lutte contre l'impunité se doit d'être
une priorité dans la perspective de la reconstruction
d'une nation tolérante véritablement libre
et démocratique. Afin d'ouvrir la porte à une
réconciliation vraie dans la paix des coeurs et
des esprits, une commission internationale d'enquête
devra faire la lumière sur les violations des
droits humains de ces dernières années.
Les auteurs de ces exactions devront être jugés
devant la C.P.I.
3. La manifestation violente et massive d'une partie
de la population ivoirienne devant le 43e BIMA le 22
Octobre dernier, tend à prouver que la France
souffre en ce moment d'un déficit de confiance
en Côte d'Ivoire et plus généralement
en Afrique. Afin d'éviter de nouvelles dérives
verbales dans le climat actuel où passion rime
avec déraison, une mission d'enquête de
l'ONU doit rapidement confirmer ou infirmer l'hypothèse
de "l'agression extérieure".
4. L'organisation (et non la simple supervision) par
l'ONU de nouvelles élections, à l'instar
de ce qu'elle a réalisé au Cambodge. Le
délai imparti restant à la discrétion
des Nations Unies.
5. Une analyse concertée entre les pays de la
CEDEAO autour de la question cruciale de la citoyenneté et
de la nationalité dans cet espace sous régional.
Ce projet trouve tout son sens au vu et au su de la crise
identitaire que connaît la Côte d'Ivoire.
Cette analyse globale sur les critères d'attribution
de la nationalité
est nécessaire afin d'éviter de créer
une catégorie d'apatrides, de citoyens de nulle
part.
Dans l'action, l'excellence et l'urgence ; nous devons
AGIR !!!
Fait à Paris le 28 Novembre 2002
Pour le Collectif des Ivoiriens de France pour la Démocratie
Le Secrétariat Général : Oumou Kouyaté,
la Présidente
Côte d'Ivoirité : La Crise
identitaire.
Voies de résolution
1. Le refus de la banalisation de l'ethnisme
et du concept fallacieux d'"ivoirité".
>> Soutenir l'action
de Reporters Sans Frontières. Appel au Conseil
de sécurité
des Nations Unies afin qu'il saisisse la CPI (Cour Pénale
Internationale) sur la situation de la presse en Côte
d'Ivoire.
2. La lutte contre l'impunité dans la
perspective de la reconstruction d'une nation véritablement
libre, démocratique et tolérante. Afin
d'ouvrir la porte
à une réconciliation Vraie dans la paix
des coeurs et des esprits,
>> une commission internationale
d'enquête devra faire la lumière sur
les violations des droits humains de ces dernières
années. Les auteurs de ces exactions doivent être
jugés.
3. Les diverses implications extérieures
doivent
être recherchées afin d'éviter de
nouvelles dérives verbales dans ce climat où passion
rime avec déraison,
>> une mission d'enquête
de l'ONU doit rapidement confirmer ou infirmer l'hypothèse
de "l'agression extérieure".
4. L'organisation (et non la simple supervision)
par l'ONU de nouvelles élections.
>> Prendre l'exemple
du Cambodge (délai et durée restant à définir).
5. La problématique de la Nationalité
et de la Citoyenneté dans l'espace CEDEAO.
>> Une analyse concertée
entre les pays de la CEDEAO autour de la question
cruciale de la citoyenneté et de la nationalité dans
cet espace sous régional est une vraie nécessité,
afin d'éviter de créer une catégorie
d'apatrides, de citoyen de nulle part.