28 mai 2008

"Nous avons bu la même eau" de S. Avédikian - scéances supplémetaires

L'Espace Saint Michel - Paris 5ème continue à programmer, en exclusivité à Paris
Tous les soirs à 19h30 du mercredi 28 mai au mardi 3 juin


Nous avons bu la même eau
de Serge Avédikian




** Presse et internet

Le Monde du 15 mai 2008 et lemonde.fr
Télérama du 14 au 20 mai et télérama.fr
Marianne du 17 mai
Le Monde Diplomatique, monde-diplomatique.fr - sites cinéma et documentaire, ainsi que
Turquieeuropéenne.org - Yevrobatsi.org etc...

www.serge-avedikian.com

19 mai 2008

Réponse à Roland Hureaux sur son article "Obama, un blanc déguisé en noir"

Lettre ouverte concernant l'article "Obama, un blanc déguisé en noir" de Roland Hureaux. Par David Collin, Louise L. Lambrichs, Abdourahman Wabéri et Régine Waintrater.



Négationnisme et racisme ont de beaux jours devant eux. On a tout lieu de le croire en lisant l'article "Obama, un blanc déguisé en noir", article signé Roland Hureaux et paru sur le site de l'hebdomadaire Marianne, wwwMarianne2.fr, le 13 février 2008, ainsi que sur le site www.libertepolitique.com.

Nous avons tout lieu de le croire et nous nous indignons profondément de cette publication où l'auteur dit vouloir comprendre le phénomène Obama en se penchant sur ses origines. Premier constat: "Obama n'est pas un vrai noir" sur le plan culturel. Entendez: Hureaux sait lui ce qu'est un vrai noir et à quoi on le reconnaît1. Par exemple l'origine africaine, kenyane, d'Obama est liée à l'ethnie Luo, qui appartient à cette grande famille de pasteurs d'Afrique de l'Est dits "nilo-hamitiques", et à propos de laquelle, souligne Roland Hureaux, l'expression que de Gaulle appliqua une fois aux Juifs, "peuple sûr de lui et dominateur" est particulièrement adéquate. Une expression pour le moins controversée, qu'eut de Gaulle en 1967 à l'occasion de la guerre israélo-arabe et qui exprime une vision essentialiste des groupes humains, réduits à de grotesques catégories dont on croyait l'espèce disparue depuis la fin du dix-neuvième siècle ou, pour le moins, depuis les lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Et vouloir appliquer cette expression aux "peuples nilo-hamitiques", dénomination légendaire issue du vieux fond de l'africanisme colonial, n'est pas innocent quand la catégorie "nilo-hamitique" est ensuite attribuée aux Tutsi du Rwanda, alors que les Hutu seraient eux "bantous", peuple natif de la région voué à l'esclavage et donc "authentiquement noir" si l'on suit le raisonnement de l'auteur.

Cette idée d'une origine étrangère des Tutsi rwandais a été constamment utilisée par les idéologues génocidaires et leurs partisans, pour induire que les Tutsi étaient des conquérants, des envahisseurs, un "peuple sûr de lui et dominateur". Une origine mise à mal par les scientifiques et les historiens tels Jean-Pierre Chrétien, Gérard Prunier ou Jean-Marie Kayishema qui ont bien démontré que les Tutsi et les Hutu, sans oublier les Twa, ont les mêmes racines, qu'ils partagent les mêmes traditions et la même langue. En reprenant cette thèse, Roland Hureaux se situe donc dans le camp de ces néo-négationnistes (nombreux relativement aux récents génocides pourtant bien documentés, tant par les textes historiques que par les enquêtes, qu'il s'agisse du génocide contre les Tutsi au Rwanda ou contre les Bosniaques musulmans en Bosnie), camp auquel appartient également l'ancien rédacteur en chef adjoint de Marianne, Pierre Péan, auteur de Noires fureurs, blancs menteurs ;Péan, cité dans l'article comme "courageux journaliste", et qui nie ouvertement toute implication de la France au Rwanda - implication amplement démontrée notamment par Patrick de Saint-Exupéry dans son livre L'Inavouable, la France au Rwanda".

Le vocabulaire de Roland Hureaux est plus explicite encore. Outre le terme "nilo-hamitique", il utilise l'expression "l'armée des ci-devants" pour qualifier l'armée rebelle tutsi, autrement dit, l'armée des "anciens dominateurs" (Définition de "ci-devants": nobles dépossédés de leur titre pendant la Révolution). On retrouve là un langage qui nous est familier. De même, Roland Hureaux évoque une armée de plumitifs à la solde du régime de Kigali (pour qualifier la diaspora tutsi, les survivants du génocide et leurs soutiens journalistiques qui combattent révisionnisme et négationnisme contre le génocide), et les "agents conscients ou inconscients de l'internationale tutsi". On croit rêver. Agents: passe encore, la règle du genre veut que l'on cherche partout des complots et des manipulateurs. Mais "l'internationale tutsi" ? On ne peut lire ces mots sans frémir. Que les victimes d'un génocide s'organisent en "internationale", et que par ce moyen ils répandent de fausses informations sur un génocide qui n'aurait pas eu lieu, cela est bien davantage qu'une figure de style. C'est une citation venue d'un passé non oublié, certes, mais que l'on croyait dépassé.

Retour à l'article. Qu'en 1994 l'armée rebelle tutsi soit rentrée au pays en massacrant à tour de bras, ce qui est irrecevable, expliquerait tout du génocide lui-même, qui fut pourtant annoncé des années auparavant comme imminent par plusieurs organisations internationales, dont la MINUAR, et surtout minutieusement préparé avec importation massive de machettes, d'armes, formation et entraînement de milices, listes de Tutsi et de Hutu modérés dressées à l'avance, fosses communes préparées ; l'armée rebelle tutsi qui ayant pris de panique le pouvoir majoritaire hutu - une dictature dans les faits - l'aurait conduit à un génocide de défense, une pure réaction de survie, et donc pas vraiment ce qu'on définit comme un génocide. Roland Hureaux ne s'arrête pas en si bon chemin et fait plus que flirter avec le négationnisme quand il met en doute l'existence même d'un génocide, en écrivant que grâce à la diaspora tutsi en Europe (...) relais efficace de la propagande de Kagame, personne ne conteste le chiffre devenu "canonique" de 900 000 victimes, pourtant issu d'une source unilatérale - bien que constaté et reconnu par les ONG sur place, et par les organisations internationales sur le terrain, dont l'ONU - et que personne ne parle des massacres de Hutus par les Tutsis qui, quoique moins concentrés dans le temps, ont fait sur la longue période encore plus de victimes. On a bien lu, il s'agit d'un déni caractérisé de génocide et qui réutilise la théorie bien française du "double génocide", outrageusement négationniste, et que plusieurs hommes politiques français ainsi que nombre de négationnistes rwandais, ne se sont pas privés d'utiliser pendant et après le génocide. Cela fait partie d'un certain vocabulaire et d'une certaine façon de présenter les choses reconnaissables entre toutes. Il s'agit là, pour nous, d'un discours qui relève de l'intolérable.

Note:
1. Barack Obama avait deux ans à la séparation de ses parents. Il fut élevé par sa mère et ses grands-parents. Mais pour Hureaux, cela ne change rien puisque le sang ne ment pas, et Obama est un Luo déguisé en Africain Americain.

Sources à consulter:

Jean-Pierre Chrétien: L'Afrique des Grands Lacs, 2000 ans d'histoire, Aubier Montaigne, Collection historique, 1998.

Roméo Dallaire: J'ai serré la main du diable, la faillite de l'humanité au Rwanda, Libre Expression, 2004.

Jean Marie Kayishema: Mythes et croyances au coeur du génocide de 1994, au Rwanda, Etudes rwandaises, Université Nationale du Rwanda n°09, septembre 2005.

Faustin Rutembesa: Le discours sur le peuplement du Rwanda et la manipulation identitaire,Cahier de Centre de Gestion des conflits UNR, n°5, 2005.

Gérard Prunier: Rwanda: le génocide, Editions Dagorno, 1999.

Patrick de Saint-Exupéry: L'Inavouable, la France au Rwanda, Les Arènes, 2004.


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Article de Roland Hureaux: Obama, un blanc déguisé en noir

Comprendre le phénomène Obama nécessite de se pencher sur ses origines, et donc de prendre le temps d'un détour par l'Afrique de l'Est, ses noblesses et son histoire. Il y a quelque chose de fascinant à voir un homme politique relativement jeune ( 47 ans) et noir comme Barack Obama briguer avec quelque chance de succès l'investiture démocrate pour l'élection présidentielle américaine. Autant que son audace, frappe l'aisance de ce candidat improbable dans un pays où aucun homme de couleur - à l'exception du général Colin Powell qui, sollicité par le parti républicain, déclara forfait - n'avait pu jusqu'ici envisager sérieusement d'entrer dans la course présidentielle. Une aisance qui le fait même qualifier de "nouveau Kennedy".

Le contraire d'un afro-américain
La vérité est qu'Obama n'est pas un vrai noir ! Il ne l'est que pour ceux qui pensent que la couleur de la peau a de l'importance. Sur le plan culturel, le seul qui importe, Obama est le contraire d'un noir américain. Non par sa mère blanche qui descendrait du président sudiste Jefferson Davis - mais aussi, plus classiquement, de paysans irlandais chassés par la famine de 1846: aux Etats-Unis, une goutte de sang noir suffit à vous faire "black". C'est de son père, Barack Obama Sr, homme politique kenyan de l'ethnie Luo, que le sénateur du Michigan a reçu une empreinte vraiment originale. Les Luos appartiennent à cette grande famille de peuples pasteurs d'Afrique de l'Est dits "nilo-hamitiques". Si l'expression que de Gaulle appliqua une fois aux Juifs, "peuple sûr de lui et dominateur", a un sens, c'est bien dans cette région du monde. Les Nilo-hamitiques sont le contraire d'esclaves ou de descendants d'esclaves. Ces peuples fiers et guerriers (Parmi lesquels les célèbres masaïs) dominèrent longtemps les Bantous, cultivateurs et sédentaires. Ils résistèrent avec succès aux entreprises des marchands d'esclaves arabes de la côte swahili, quand ils ne collaborèrent pas avec eux. Eux ou leur cousins sont au pouvoir au Rwanda, au Burundi, en Ouganda, en Ethiopie et au Soudan ( quoique les Nilo-Hamitiques soudains se prétendent Arabes). De grands hommes politiques de la région comme Julius Nyerere , fondateur du socialisme ujamaa ou Yoweri Museveni, actuel président de l'Ouganda, en sont. De même l'ancien archevêque de Dar-es-Salaam Lawrence Rugambwa, fait premier cardinal africain par une Eglise romaine qui s'y connait en chefs. Kabila, président du Congo est, dit-on, à moitié tutsi.

En héritage, la noblesse d'Afrique de l'Est
Se rattachent en effet aux peuple nilo-hamitiques les Tutsis du Rwanda et du Burundi: minorité "noble" pesant entre 5 et 10 % de la population, qui domina longtemps dans ces deux royaumes la majorité Hutu ( lesquels sont des bantous). Renversée au Rwanda en 1960, la minorité tutsi, aidée par l'ougandais Museveni, est revenue au pouvoir sous l'égide de Paul Kagame en 1994. L'armée des "ci-devants", exilés depuis plus de trente ans est rentrée au pays en massacrant à tour de bras. Les tenants du pouvoir majoritaire hutu, pris de panique, commencèrent alors à massacrer tous les Tutsis de l'intérieur et leurs amis réels ou supposés: ce futle grand génocide de 1994. Le pouvoir est aujourd'hui exercé dans ce pays d'une main de fer par une petite minorité de Tutsis de l'étranger - très peu nombreux du fait du massacre des Tutsis de l'intérieur: peut-être 1 % de la population.

La diaspora tutsi en Europe ( particulièrement forte en Belgique) et dans le monde est depuis lors un relais efficace de la propagande de Paul Kagame: personne ne conteste le chiffre devenu "canonique" de 900 000 victimes, pourtant issu d'une source unilatérale ; personne ne parle des massacres de Hutus par les Tutsis qui , quoique moins concentrés dans le temps, ont fait sur la longue période encore plus de victimes. Tous ceux qui contestent la version officielle propagée par le gouvernement de Kigali sont menacés, où qu'ils se trouvent, de lynchage médiatique ou internautique, ou de procès téléguidés dissuasifs: la France fut ainsi fort injustement mise au banc des accusés dans l'opération Turquoise pour complicité avec les génocidaires, jusqu'à ce que Bernard Kouchner aille à Canossa en se rendant à Kigali (au cours d'une visite dont l'incongruité fait débat). Le courageux journaliste Pierre Péan, qui a osé contester la version des vainqueurs tutsi et par là défendre l'honneur de l'armée française dans un livre remarquable (1), est depuis lors l'objet d' une persécution sans merci. Agents conscients ou inconscients de l'internationale tutsi, la plupart des journalistes français se sont déchaînés contre son livre.

SOS-Racisme a traîné son auteur devant les tribunaux pour racisme et complicité de génocide.

Accepté par l'establishment, il laisse froid les afro-américains
Au Kenya, l'ethnie dominante est au contraire une ethnie bantoue, les Kikuyus, servis par leur majorité relative, leur centralité et surtout une empreinte anglaise plus forte. L'actuel président kikuyu Mwai Kibaki, usé , s'est vu contesté lors de la dernière présidentielle par une coalition menée par le Luo Rail Odinga, fils d'Oginga Odinga, homme politique kenyan de la première génération, proche du père d'Obama. Que Kibaki n'ait été réélu qu'au moyen de fraudes massives est aux origines des graves tensions actuelles de ce pays. Même si le rôle des Tutsis du Rwanda est sujet à caution, être nilo-hamitique n'a certes rien d'infâmant, bien au contraire. On comprend cependant, au vu de cet arrière-fond, à quel point le phénomène Obama est singulier, à quel point surtout la culture du candidat démocrate est étrangère à celle du Deep South. Un chef Luo n'a rien à voir avec l'Oncle Tom, pas plus que les chants guerriers masaï avec les mélopées des cueilleurs de coton du Mississippi ! C'est ce qui explique sans doute que sa candidature pose si peu de problèmes à l'establishment américain et que, bien qu'il s'agisse, au moins formellement, d'une candidature "noire", elle paraisse aller de soi. C'est ce qui explique aussi peut-être la difficulté qu'éprouve la communauté noire américaine à se reconnaître dans ce candidat issu d'un univers si antithétique au sien. En définitive Obama ne s'en rapproche que par l'action sociale qu'il a eue dans les quartiers pauvres de Chicago et par sa femme qui est, elle, une authentique afro-américaine. Son élection éventuelle ne signifierait pas nécessairement une promotion de la communauté noire. Il faudrait plutôt l'analyser comme un phénomène sui generis.

(1) Noires fureurs, blancs menteurs, paru aux éditions Mille et Une Nuits"

Parution : "Rwanda : Un Génocide populaire" de Jean-Paul Kimonyo.



Il y a 14 ans, au mois d'avril 1994 débutait le terrible génocide du Rwanda. 1 million de morts. Très vite, les Editions Karthala ont publié deux ouvrages de référence sur cet épisode tragique dans l'Histoire des grands lacs d'Afrique. Aucun témoin ne doit survivre avec le concours de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme et sous la direction de l'historien Jean-Pierre Chrétien, Rwanda, les médias du génocide avec Reporters sans frontières. 14 ans plus tard, nous proposons deux nouveautés sur le même sujet: un témoignage personnel bouleversant et le travail d'un historien politiste rwandais qui plonge ses racines dans l'étude minutieuse du terrain.

Jean Paul Kimonyo est sans doute le premier historien rwandais à offrir un travail aussi ambitieux. Son ouvrage, Rwanda, un génocide populaire est le résultat d'une très longue enquête de terrain. M. Kimonyo a rencontré les acteurs survivants, il a travaillé sur les comptes rendu des registres municipaux. En employant la méthode de terrain des anthropologues, il réalise un livre d'une très grande portée historique qui explique, à partir du quotidien, comment le génocide a été conçu puis mis en oeuvre. Les deux nouveautés sur le génocide du Rwanda paraîtront dans la première quinzaine d'avril: Rwanda, un génocide populaire dans la collection Hommes et sociétés et Une jeunesse rwandaise dans la collection Tropiques.


A écouter : L'historien français spécialiste des grands lacs, Jean-Pierre Chrétien commente la sortie de Rwanda, un génocide populaire et explique en quoi cet ouvrage rédigé par un historien rwandais fait novation : cliquer ici

14 mai 2008

Journée d'étude : L'autorité de l'archive : littérature, histoire

groupe phi
groupe de recherche en poétique historique et comparée
(CELAM Université Rennes 2)

dans le cadre du programme sur
« l'autorité en littérature »
(2006-2008)


Journée d'étude en collaboration avec le département d'Histoire de l'ENS
L'autorité de l'archive :
littérature, histoire



jeudi 5 juin 2008

9h30-17h30

ENS
45 rue d'Ulm
Salle d'Histoire
(escalier D, 2e étage)



Matinée :

9h30 : présentation

9h45 : « Translation d¹autorité. Du titre juridique au document historique :
la matrice des Archives nationales »
par Yves Potin (Paris 10)

10h30 : « Souvenirs individuels et archives officielles : l¹histoire de/dans
la littérature soviétique des années 60 et 70 »
par Cécile Vaissié (Rennes 2)

11h15 : Le jeu artiste avec l¹archive est-il constitutif d¹une autorité ?
(V. Chalamov, D. Kis, J. Littell, E. Sivan »
par Catherine Coquio (Poitiers)

12h : Discussion


Après-midi :

14h45 : « L¹archive manquante : réponses de l¹historiographie ashkénaze et
de la littérature yiddish moderne »
par Carole Matheron (Paris 3)

15h30 : « La littérature revue et corrigée par l¹archive. Lectures de Péter
Esterházy »
par Inès Cazalas (Strasbourg 2)

16h15 : « Les dernières tendances de la fictionalisation de l¹archive »
par Philippe Mesnard (Collège international de philosophie)

17h : Discussion et conclusion



Coordination : Sophie C¦uré (ENS), Emmanuel Bouju (Rennes 2)

Libellés : ,

06 mai 2008

Protection des archives : pétition et communiqué

Source : Site Parlements (Textes de loi, communiqués, revue de presse etc.)

Communiqué de l'AUSPAN sur le texte adopté le 29 avril (30 avril)

L’Assemblée nationale a adopté le 29 avril en l’amendant sérieusement, le projet de loi voté par le Sénat le 8 janvier dernier sur les Archives. Dès le lendemain, le Sénat a entrepris de nouvelles auditions, auxquelles l’AUSPAN a participé, en vue d’une nouvelle délibération fixée au 15 mai prochain.

Le texte voté par l’Assemblée a rejeté une partie des amendements les plus discutables du Sénat et limité le champ des archives incommunicables, revenant partiellement donc à un texte proche du projet déposé par le gouvernement. L’Assemblée a tenu compte de la mobilisation des usagers et historiens, explicitement mentionnée à plusieurs reprises. Le texte voté par les députés est un texte de compromis, qui améliore la loi de 1979 sur divers points, mais décevra ceux qui attendaient une réelle libéralisation de la loi d’archives.

Les véritables avancées du texte adopté par l’Assemblée sont les suivantes : l’ouverture immédiate d’une masse de documents administratifs courants accessibles auparavant dans un délai de trente ans, la réduction de la plupart des délais des documents soumis à restriction qui nous rapproche (timidement) des pratiques des grandes démocraties occidentales, la limitation de la catégorie des archives incommunicables, la réaffirmation que les dérogations doivent être instruites dans un délai « raisonnable » de deux mois et la prise en compte des archives des communautés de communes dont l’importance s’est accrue avec la décentralisation (voir les amendements au texte du Sénat à l’adresse suivante : http://www.assemblee-nationale.fr/13/ta/ta0135.asp).

Demeurent dans ce texte des éléments inacceptables ou potentiellement dangereux. Il faut supprimer les premiers et éclaircir les seconds.

La catégorie d’archives incommunicables est avalisée, même si elle se limite désormais aux armes de destruction massives, bactériologiques, etc. Sur ce point, alors que la loi actuelle permet déjà de protéger à long terme ces papiers, la majorité de l’Assemblée n’a pas voulu accepter les amendements de l’opposition, reprenant une proposition venant de milieux militaires, l’établissement de délais longs et révisables (cent ans, éventuellement renouvelable par une commission spécialisée).

Le texte adopté conserve une série d’imprécisions rédactionnelles sources de futurs conflits juridiques. Le terme « d’excessif » est ainsi maintenu pour les demandes de dérogation : « L’autorisation de consultation (…) peut être accordée aux personnes qui en font la demande dans la mesure où l’intérêt qui s’attache à la consultation de ces documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger ». De même les députés ont refusé de transformer le mot « peut être » de cet alinéa en « est », refusant du même coup de faire des dérogations un droit soumis à condition certes, mais effectif. Les dérogations restent ainsi des libéralités de l’administration. Surtout, la codification de la protection de la vie privée est définie en termes nouveaux et problématiques. Le délai de cinquante ans, qui peut encore être remis en cause par le Sénat, s’appliquera « pour les documents dont la communication porte atteinte à la protection de la vie privée, rend publique une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique nommément désignée ou facilement identifiable ou fait apparaître le comportement d’une personne dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice ».

Le débat révèle enfin un autre problème potentiel. Le recours aux services de société d’archivages privées a été légalisé et pourra être étendu. Il était clair, d’après la discussion parlementaire, que la communication d’archives publiques intermédiaires pourra être faite par ces sociétés privées. Cette décision menace plus encore, en ces temps de restrictions budgétaires, l’avenir du service public. Elle risque d’aggraver leur balkanisation.

Le texte adopté par l’Assemblée – plus libéral que celui voté par le Sénat – reste néanmoins en retrait par rapport à celui déposé par le gouvernement. Les délais d’accès aux archives notariales, aux actes de mariages, aux documents statistiques de l’INSEE et aux documents judiciaires seraent de soixante quinze ans, et non de cinquante ans comme proposé par le texte initial. Concernant les délais de communicabilité, déjà très longs par rapport à ceux en vigueur dans les autres démocraties occidentales, l’AUSPAN demande le retour au texte du gouvernement. De plus, la catégorie d’archives incommunicables doit disparaître de la loi et une définition restrictive de la vie privée doit faire l’objet d’une rédaction qui lève toutes les ambiguïtés restantes. Nous nous associons, par ailleurs, à la critique de l’Association des archivistes français qui déplore l’absence d’étude d’impact de la nouvelle loi, étude à laquelle il conviendrait d’ajouter selon nous un bilan de l’ancienne, et ce depuis le rapport Braibant de 1998.

L’AUSPAN appelle les usagers et les chercheurs à rester mobilisés. Il faut préserver, lors du vote en deuxième lecture du Sénat, les avancées proposées par l’Assemblée ce 29 avril et les élargir. Il convient aussi de convaincre les parlementaires qu’une véritable libéralisation de l’accès aux archives publiques passe par des délais plus courts de communicabilité (donc la généralisation d’un délai moyen de cinquante ans) et une définition restrictive de la vie privée, deux points qui aujourd’hui ne sont pas acquis.


Adresse à Mesdames et Messieurs les députés et sénateurs

Un projet de loi d’archives voté en première lecture par le Sénat le 8 janvier 2008 va être soumis au vote de l’Assemblée Nationale le 29 avril 2008.
Ce projet de loi contient des dispositions qui portent gravement atteinte à la liberté d’écriture et à la recherche historique. Il restreint de façon arbitraire le droit d’accès des citoyens aux archives publiques contemporaines (depuis 1933).

Nous attirons plus particulièrement l’attention des Mesdames et Messieurs les députés et sénateurs sur les points suivants :

1 L’article L 213-2-II crée une nouvelle catégorie d’archives, les archives incommunicables. Certaines archives pourront ne jamais être communiquées au nom de la sécurité nationale ou de la « sécurité des personnes ». D’une part, le législateur est en contradiction manifeste avec ses propres intentions : il déclare à l’art. L 213-1 que les archives publiques sont « communicables de plein droit » pour créer, à l’article suivant, la catégorie archives incommunicables. D’autre part cet article n’a aucune raison d’être : les informations concernant les armes de destruction massives sont couvertes par l’art. 213-2-I-3° et les informations de nature à compromettre la sécurité des personnes sont visées par l’art. 213-2-I-4°. Enfin cet article est contraire aux recommandations du Conseil de l’Europe précisant que « toute restriction doit être limitée dans le temps » (point 2.1.5. de la Recommandation n° R 2013).
- Nous demandons la suppression de l’article L 213-2-II.

2 Au nom d’une conception inédite « de la protection de la vie privée des personnes » le projet de loi justifie l’allongement du délai d’ouverture des archives publiques. Ainsi un carton contenant un seul document rendant public une « appréciation ou un jugement de valeur » ne pourra être consultable qu’à l’expiration d’un délai de soixante-quinze ans (art. L 213-2-I-4°). Cette expression particulièrement floue autorisera la fermeture d’archives publiques, tels les rapports de préfet. Qui décidera, et sur quels critères, de leur communicabilité ? Par ailleurs, substituer au délai de soixante ans actuellement en vigueur, un délai de soixante-quinze ans compromet les études historiques sur les années trente, et sur le régime de Vichy puisque cela revient à soumettre au privilège d’une dérogation l’étude de documents aujourd’hui librement accessibles.

- Nous demandons la suppression des expressions « appréciations et jugements de valeur » et le retour au délai de soixante ans prévu par la loi du 3 janvier 1979, art. 7-5 protégeant « les documents qui contiennent des informations mettant en cause la vie privée ».
- De plus il serait nécessaire que la possibilité d’obtention d’une dérogation (art. L. 213-3) soit explicitement mentionnée au nouvel art. 25-II.
- Enfin, les délais de réponse n’étant pas fixés, certaines dérogations se font attendre au-delà d’un temps raisonnable. Nous demandons que les réponses parviennent aux demandeurs dans le délai légal de deux mois.

3 L’article L 213-3-I instaure un nouveau régime de dérogation pour la consultation des documents avant l’expiration des délais légaux d’ouverture. Le chercheur devra désormais justifier que ses travaux ne portent pas une « atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger ». Comment définira-t-on « l’atteinte excessive aux intérêts de la loi » ? Le régime déjà extrêmement restrictif de la dérogation se trouve de la sorte encore réduit, au point de laisser craindre sa disparition pure et simple.
- Nous demandons le retour au régime de la dérogation prévu par l’art. 8 de la loi du 3 janvier 1979 : « Cette consultation n’est assortie d’aucune restriction, sauf disposition expresse de la décision administrative portant autorisation ».

4 Enfin, le système des protocoles, déjà en vigueur pour les Chefs d’État et dont on a constaté les dérives dans certains cas est étendu aux papiers des ministres (Art. L 213-4). Il offre à ces derniers, jusqu’à leur décès, la possibilité de traiter les archives publiques produites par eux et par leurs collaborateurs comme des archives privées jusqu’au décès des ministres.
- Nous demandons que les protocoles soient soumis à un délai maximal de cinquante ans.
Renouant avec la culture du secret – le mot est employé quatorze fois dans le texte – ce projet de loi, va à l’encontre des recommandations du Conseil de l’Europe et des pratiques et législations en vigueur dans les grandes démocraties occidentales.
Les dispositions extrêmement restrictives de ce nouveau texte sont empreintes de méfiance et sont inspirées par une vue largement fictive de ce qu'est la pratique de l'archive. Ce dont les archives françaises ont besoin en France n’est pas d’un retour déguisé au secret d’état, mais sur le modèle des législations étrangères, d’une plus large ouverture. Peut-on raisonnablement penser que la démocratie française en sortirait affaiblie ?


Pour signer l'adresse aux sénateurs et députés, merci de bien vouloir envoyer votre nom, en précisant vos qualités (doctorant, chercheur, usager, généalogiste...) et, si nécessaire, votre institution de rattachement à l'adresse suivante : auspan2008@gmail.com

Rencontres-débats autour du film de Serge Avédikian "Nous avons bu la même eau"




Espace Saint Michel (Paris 5ème) - Semaine du 14 au 20 mai 2008


Dans le cadre de la sortie en salle du film documentaire de Serge Avédikian
« Nous avons bu la même eau »

Arteva, avec le parrainage de la Fondation Internationale Hrant Dink et l’accueil de l’Espace Saint Michel, vous propose

Quatre rencontres-débats exceptionnelles
A l’issue les projections du film à 19h (durée 72’)

Mercredi 14 mai
Avec Cengiz Aktar et Isabelle Kortian (Fondation Internationale Hrant Dink)

La situation de la société, de l’adhésion à l’Union Européenne et de la « question arménienne » en Turquie : une vision des proches de Hrant Dink.

Vendredi 16 mai
Avec Raymond Kevorkian (historien, écrivain) et Hélène Piralian (psychanalyste, écrivaine)

Déplacements forcés de populations : chassé de ses terres, quelle place pour la mémoire de l’autre et le deuil ?

Samedi 17 mai
Avec Yves Ternon (historien, écrivain) et Laure Coret-Metzger (Aircrige, universitaire)

Le génocide des Arméniens, la Shoah et le génocide des Tutsi au Rwanda: similitudes et différences.

Mardi 20 mai
Avec Claire Mouradian (historienne, écrivaine) et Bernard Dréano (Helsinki Citizen Assembly)

Les vérités de l’Histoire : comment les hommes peuvent-ils combattre la désinformation, ou venir à bout des tabous ?

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Livres et DVD : les derniers ouvrages des intervenants seront présentés, ainsi qu’arménie(s) édité par Arteva et le DVD du film édité par Chaletfilms